samedi 1 décembre 2012

"M..." épisode 1


« M… » est une jeune fille que j’ai rencontrée au mois de septembre, c’était juste après la rentrée… Elle avait alors 13 ans ½.

J’avais envoyé un courrier à de nombreux médecins généralistes, leur proposant de prendre connaissance de mon activité et de donner mes coordonnées aux parents d’adolescents qui rencontraient un problème pour lequel la réponse ne pouvait pas être uniquement médicale.

C’est ainsi que la maman de « M… » a découvert mon existence et m’a téléphoné, en larmes, me disant que sa fille était allée au collège, le jour de la rentrée, s’était très vite retrouvée à l’infirmerie et, depuis, ne voulait plus y retourner.

Je commence toujours par faire, ce que j’appelle un « entretien de diagnostic », qui dure entre 1 h 30 et 3 heures. Lors de cette rencontre, j’ai un dialogue avec les parents, puis, en tête à tête avec l’ado. Enfin, nous décidons ensemble de poursuivre par un accompagnement, une ou plusieurs heures par semaine, selon les possibilités des personnes.

Les parents, quel que soit le cas, me disent toujours : « je ne sais pas comment vous avez fait, il ou elle ne veut parler à personne, d’habitude !

Lorsque je suis arrivée, « M… » avait filé dans sa chambre.
Ce n’était pas plus mal : il fallait que sa maman puisse exprimer ses inquiétudes, ses angoisses. Il fallait qu’elle puisse pleurer, me raconter à quel point elle était démunie de voir sa fille souffrir et qu’elle était blessée d’entendre le CPE dire : « Ah non, ça ne va pas recommencer comme l’année dernière ! »
De fait, en 4ème, « M… » avait commencé à avoir quelques problèmes de comportement, à avoir des punitions et des remarques, à se rebeller et à faire l’école buissonnière…

Et oui ! Le problème, c’est que ça commence pratiquement toujours comme ça !
Si l’origine de la phobie scolaire n’est pas le harcèlement ou le racket, le jeune commence par exprimer son malaise en faisant des bêtises…
Ce sont des maladresses de communication. Ils essayent de contraindre les adultes à entendre leur point de vue, même s’ils ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent exprimer… : ça ne va pas c’est tout, ou plutôt c’est trop.

En faisant l’école buissonnière, cette adolescente ne voulait pas aller s’éclater avec ses copines mais échapper à l’angoisse.
Du reste, elle n’était pas sortie de la maison de tout l’été, elle ne pouvait plus sortir…

Ce premier jour, « M… » a accepté de descendre me parler après que sa maman soit allée lui dire quelques mots bien choisis de ma part.
Elle était recroquevillée, elle détournait la tête, mais peu à peu j’ai gagné sa confiance.

Elle a compris que je ne venais, ni la juger, ni la contraindre, mais l’aider.
Et ce qu’elle voulait, c’était ça : qu’on l’aide à surmonter cette angoisse.

Elle m’a expliqué les choses à sa façon, de son point de vue, légitimement différent de celui des enseignants, du principal…, j’y reviendrais.

Elle a finalement accepté ma proposition de travailler ensemble.

Les premières fois, la maman de « M… » avait caché à son mari que mes prestations étaient payantes, elle utilisait une partie de son propre salaire pour venir en aide à sa fille car le papa de « M… » était très remonté contre elle ; il voulait la contraindre à retourner à l’école en l’accusant d’être paresseuse…
Je l’ai rencontré à la fin de ma deuxième visite et là, il m’a exprimé une chose très intéressante : « ce que je n’aime pas chez elle, c’est qu’elle ne sait dire ni bonjour, ni au revoir ! » et de fait, « M… » baisse la tête lorsqu’on lui dit l’un ou l’autre, et elle ne répond pas.
Ce à quoi j’ai répondu : « ce que vous ne savez pas c’est que votre fille est timide. »
J’ai ajouté que pour lui, c’était sans doute inimaginable car elle se sentait très à l’aise et en confiance avec son père, suffisamment pour blaguer ou répondre…
Mais face aux autres adultes, c’était autre chose…
J’ai eu un élève comme ça : à chaque fois qu’il se faisait disputer, et ce n’était pas rare, il affichait un petit sourire en coin que tout le monde interprétait comme de l’insolence.
En fait, il ne savait pas comment réagir : il était tout simplement gêné !

Fin de l’épisode 1 de mon travail avec « M… ». Je vous raconterai la suite bientôt, car, bien sûr, l’histoire continue.
Je vous parlerai des avancées et des freins
Mais peut-être que certains d’entre vous se reconnaissent déjà en elle ou en ses parents !

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