lundi 3 décembre 2012

Souvenir de "L..."


« L… » était un de mes élèves au collège.

Ce n’était pas un cas de phobie scolaire mais j’ai envie d’en parler pour montrer une situation conflictuelle.
Ici, les deux interlocuteurs sont un enseignant et un élève…

« L… » était un élève de 3ème, souriant, gai…
Il n’aimait rien tant que de faire des blagues, jamais méchantes, parfois envahissantes… Il ne choisissait pas toujours bien le moment de faire des vannes.
Je l’ai vu une fois ramper dans la salle de permanence, juste pour rigoler…
Bref, c’était une amusette.

C’est un fait que cette attitude n’était pas propice à la concentration, la sienne ou celle des autres…
Il avait des possibilités mais les résultats étaient assez catastrophiques.
Ses parents ne le cautionnaient pas mais ils voyaient bien que les observations dans le carnet et les retenues multiples ne le faisaient pas changer.

« L… » n’aimait pas le cours d’allemand, sans doute parce que le sérieux de l’enseignante s’accordait mal avec son profil ludique. Il s’y ennuyait, était complètement coulé et devenait rapidement gênant.

Dans le collège, il y avait parfois des problèmes de violence entre ados et, suite à une insulte d’une élève envers un adulte, il avait été décidé que tout acte de violence d’un élève envers un autre ou toute insulte envers un adulte entraînerait l’exclusion immédiate de ½ journée à 2 jours, selon la gravité des faits + 2 règlements à copier à la maison.  
Je trouvais que ce système avait au moins le mérite de laisser moins de place à la subjectivité que le vide mais je regrettais que le travail soit bêtement un règlement à copier.

La plupart du temps c’était moi qui appelais la famille lorsqu’il s’agissait d’une bagarre et je veillais à faire une médiation même si à l’époque je n’avais pas encore tous les outils pour cela mais : je les recevais individuellement, puis ensemble dans le but que leur conflit ne reprenne pas de plus belle à leur retour.

Il est un autre cours où les choses se sont très mal passées pour « L ».
C’était pourtant une matière qui aurait dû représenter une bulle d’oxygène dans la semaine mais il n’était pas le seul élève de troisième à s’en plaindre.
L’enseignante mettait un cadre, des règles, mais il semble que dès que les élèves avaient accepté ce cadre, elle le resserrait encore plus.

Un jour « L… » devait lui présenter son carnet. Elle voulait lui mettre une observation parce qu’il était allé en étude au lieu de venir en cours.
Comme il refusait de le lui donner, elle l’a menacé d’une retenue et il a répondu « j’en ai rien à f… ! »
Maladresse de communication sans aucun doute !
« L… » avait perdu son sourire depuis longtemps dans ce cours…

L’enseignante a lâché ses élèves pour aller téléphoner aux parents en disant qu’il l’avait insultée.

Elle avait toujours interprété l’attitude amusette de « L… » comme un manque de sérieux, lui avait prêté l’intention de perturber son cours et avait essayé de le contraindre à changer à coup de retenues et d’observations, sans succès.
« L… » de son côté, pensait que l’enseignante ne l’aimait pas, qu’elle n’avait qu’un but, le faire renvoyer et faisait de la résistance en allant en étude en disant que de toute façon, la prof disait qu’elle ne voulait plus de lui.  

Quand le père est arrivé, il a dit qu’il savait bien que son fils n’était pas un ange mais qu’il ne comprenait que l’on veuille exclure son fils car il n’avait pas insulté l’enseignante.
Il a fallu que je compose avec lui, puisqu’il avait raison : c’était une interprétation de la nouvelle règle, un abus de pouvoir…

Bien sûr, tout comme le père, j’ai dit à « L… » qu’il aurait mieux valu qu’il n’aie pas cette parole malencontreuse et je l’ai officiellement exclu de ce cours jusqu’à la fin de l’année en l’obligeant à réviser, en étude, ses matières de brevet et l’allemand, à la place.

L’enseignante a trouvé que c’était trop facile.

Moi j’ai préféré lui éviter de se faire taper dessus par un ado qui n’avait absolument aucune propension à la violence mais qui était au bord de péter les plombs !...

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